Nos pères nous le répètent inlassablement : « c’était mieux avant », on était plus généreux, la vie avait plus de goût, nous avions plus de valeurs, etc.
Est-ce une simple nostalgie des temps passés, un coup de blues de se sentir hors de son époque, ou un véritable cri d’alarme ?
Un constat nous semble certain : plus la société devient moderne, sophistiquée, plus elle devient stressante, pour ne pas dire anxiogène. Et qui dit stress dit forcément dégradation des relations sociales et humaines. On calcule tout, tout doit être minuté, on court dans tous les sens, nous sommes tout le temps sur le qui-vive. La société contemporaine déshumanise à coup sûr les individus.
Mais, à la base, un homme naît-il bon ou le devient-il ? la bonté implique toutes sortes de valeurs : la sympathie, l’empathie, le tact, la sincérité et surtout, selon nous et ce qui devrait se dégager, à coup sûr, de la bonté : l’authenticité. Une personne
« bonne » est nécessairement une personne authentique.
Qu’est-ce que l’authenticité ? la définition est à la fois simple et d’une inextricable complexité. C’est être soi-même, être dans le réel, le réel objectif, pas celui d’un moule ou d’une norme généralisée qui fausse la communication. Pas un réel stéréotypé. Etre soi-même c’est oser plaire, oser choquer parfois (mais sans le vouloir nécessairement), oser également indiquer la voie qui nous semble bonne.
Un homme bon est également un homme qui n’est pas intéressé, au sens large du terme. On s’intéresse à la personne en tant qu’ensemble humain et comportemental, un être qui ne ressemble aucunement à un autre, afin d’interagir avec lui de manière neutre mais bien-intentionnée, le but étant l’harmonie.
Etre non intéressé suppose bien évidemment de ne pas tenter de manipuler, de nuire, de tirer profit de la personne. Cela aboutit directement à la notion de respect. Respecter c’est finalement accepter l’autre en l’intégrant dans sa vie, objectivement, sans réaction négative ou tentative malsaine à son encontre, quelle qu’elle soit. Le respect implique la liberté. Il est inconcevable de respecter quelqu’un si l’on est en proie à des dogmes ou des pulsions « inhumaines » en soi, des pulsions anormales devrait-on dire. C’est ce qu’enseignent la morale et la religion depuis la nuit des temps. Acceptons-nous, aimons-nous dans l’idéal ou, à la rigueur, tolérons-nous.
La réalité des hommes laisse voir de plus en plus la montée des ego. On cherche à rester seul dans l’arène, « l’autre » est forcément suspect, rival. Une espèce de jalousie schizophrénique de l’homme envers l’homme, très souvent infondée objectivement, dans la mesure où on rejette le prochain sans dépasser ses propres peurs. Au fond la personne qui réagit mal a peur de se perdre, de se diluer dans l’autre. L’homme a toujours été mais est maintenant, pire que jamais, identitaire et communautariste, sans qu’il s’en rende nécessairement compte.
A cet équilibre humain très fragile est venue se greffer la modernité des sociétés, qui a « mouillé encore plus la boue » comme disent les arabes. Ainsi, en ces temps obscurs, le rôle des garde-fous et des exutoires est plus que nécessaire, mais très souvent, les gens entendent mais n’écoutent pas…
Mehdi BERBAGUI